Liz Magor au sujet de l'œuvre Good Shepherd
Gypse polymérisé, laine, sacs plastique, drap
133,5 × 261, 5 × 30,5 cm
Collection du Migros Museum für Gegenwartskunst, Zurich
Dans cette œuvre, intitulée Good Shepherd, il y a un pull qui semble venir de Being This. Et c’est probablement le cas. Quand je rassemblais les vêtements pour Being This, j’avais beaucoup de morceaux différents, qui parfois ne cadraient pas avec la pièce. Certains avaient été reprisés de nombreuses fois. Le pull dans Good Shepherd est raccommodé de manière, disons… plutôt maladroite. Puis, il y a un gros trou qui n’a jamais été raccommodé. Le pull a aussi un motif qui me semble être scandinave. C’est peut-être un motif scandinave traditionnel. Je le reconnais, mais je ne pourrais pas l’identifier. Tout ce que je sais, c’est que c’est scandinave. J’aime l’idée que quelqu’un ait voulu réparer ce pull, qu’on ait fait un effort pour le garder, sans se douter que c’est à cause de ce motif qu’il est important. Toute cette complexité. Le pull demeure vivant à mes yeux. La couverture demeure vivante parce que c’est une couverture de la Baie d’Hudson. Ce n’est pas une pièce de grande valeur et elle a été réparée sur le côté. Elle a beaucoup de vécu. Je ne crois pas qu’il s’agisse d’une pièce de collection. Je ne me souviens pas où je l’ai trouvée, mais je n’achète pas sur eBay. Je ne cherche pas les objets rares ou de valeur… Je cherche des trésors dans les déchets…
Le pull, la couverture et cette photographie d’un colley qui semble vouloir protéger le petit agneau sont tous étalés sur ce qui s’apparente à des boîtes de carton appuyées contre le mur. Toutefois, on se rend vite compte que le carton n’y est plus, ou seulement en tant que vestige. Et c’est dû au fait que j’ai utilisé des boîtes comme moule. Pour les moulages plus complexes comme les blousons de cuir, je dois utiliser des moules en caoutchouc parce que leur souplesse me permet de rendre les petits détails. La boîte de carton est un moule plutôt brut et salissant. Le procédé est rapide et très simple. Je verse la matière dans la boîte, que je retire ensuite. Je mets le pigment d’abord pour obtenir la couleur. Ces boîtes sont donc des objets jetables. Ce sont comme des serviteurs. Dans les commerces, les boîtes contiennent des objets importants; on achète ces objets, puis les boîtes sont jetées. Je mets donc en valeur ce qu’on jette. C’est une valorisation du rebut. Le chien met en valeur ce qui est jeté. Et on se retrouve avec cette forme d’attention vigilante ou de protection, c’est ce que fait l’artiste en un sens. C’est ce que je fais de manière très ciblée. Et je le vois dans la culture. Cette forme d’attention vigilante et de protection se manifeste de toutes sortes de manières.